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Souffrance au travail

Souffrance au travail
L’insaisissable mal-être au travail dans la Fonction publique territoriale
de Michel Catlla et Xavier Albanel
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Harcèlement moral : quels recours ?

Depuis 2002, la législation reconnaît pleinement le harcèlement moral.

La lente reconnaissance des victimes

 

Le harcèlement moral est une notion apparue récemment dans le droit français : le côté non démontrable par des faits vérifiables immédiatement en a freiné la reconnaissance.
Auparavant, ces affaires n’aboutissaient que par des démonstrations juridiques tortueuses. Ainsi, un des premiers cas reconnus dans l’enseignement privé sous contrat (en 1996 dans les Vosges) concernait une personne qui s’était défenestrée (et est d’ailleurs restée paraplégique). A l’époque, il n’avait été reconnu qu’un accident du travail, et, dans un premier temps, seule la CPAM avait été condamnée (parce qu’elle n’indemnisait pas assez la victime).
Pourtant, des ouvrages de médecins et de juristes (dont Marie-France Hirigoyen) ont montré qu’il y avait bien une souffrance destructrice qui devait être prise en compte sur les plans judiciaire et médical.

 Enfin une loi


La loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002 a ainsi pleinement intégré cette notion en donnant une définition au harcèlement moral : ce sont “les agissements répétés qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel”.
A noter qu’il peut être le fait de l’employeur, d’un supérieur hiérarchique ou d’un collègue, et ce harcèle-ment peut être sanctionné qu’il soit intentionnel ou non. Il n’est pas nécessaire qu’il en soit résulté un dommage pour le salarié. Pour être qualifié de harcèlement, les agissements doivent concerner davantage la personne du salarié que son travail.
En droit pénal (que tous les personnels peuvent utiliser), le harceleur peut être condamné à un an d’emprisonnement et 15 000 € d’amende.
Une loi Fillon du 3 janvier 2003 (il a sévi partout, et jamais à notre avantage !), a voulu limiter les possibilités de recours en attribuant la totalité de la charge de la preuve au plaignant. Le juge a un important pouvoir d’interprétation et d’appréciation des faits. Toute victime peut se porter partie civile, tout comme le syndicat qui la représente.

 Repérer le harcèlement


Si le harcèlement peut naître de façon anodine, il se propage insidieusement. Certains signes doivent alerter :
- concernant le travail : retrait de tâches ou d’outils, ou confier des tâches irréalisables ou inutiles et humi-liantes, critique systématique, non transmission d’informations …
- sur les relations avec les collègues : l’isoler de ses collègues (cela permet d’ailleurs de procéder à des harcèlements collectifs : certains pervers poussent le « talent » jusqu’à cibler plusieurs personnes, chacun étant l’objet de vexations spécifiques, et isolé des autres), interdire à ses collègues de lui parler, procéder à des mises en accusation devant les collègues, faire courir des rumeurs …
- sur les relations harceleur - harcelé : volonté d’imposer une relation dominant - dominé, cibler les points supposés faibles (physique, fragilité morale ou de santé, vie personnelle …), ignorer la personne ou ne pas l’écouter, menacer de sanction, insultes, vexations, volonté de déstabilisation …

 Que faire lorsque l’on s’estime victime de harcèlement ?


Tout d’abord éviter le repli sur soi et l’isolement qui empêchent de réagir. D’autres d’ailleurs peuvent subir un harcèlement similaire, qui n’est pas perceptible par la victime car le harceleur s’arrange pour le camou-fler.
Le dialogue, avec des collègues, les représentants syndicaux puis les instances vues plus haut, est indispensable pour y voir plus clair et construire une réponse à l’agression. Il faudra notamment s’assurer que les faits sont bien constitutifs d’un harcèlement moral et ne traduisent pas une tension momentanée dans les relations professionnelles.
Il est impératif de réunir des preuves, dès que possible :
- noter par écrit tous les actes dont la répétition et la nature évoquent le harcèlement (une synthèse de tout ce qui s’est passé sera demandée d’ailleurs par les instances vues plus haut, voire par les juges) ;
- recueillir les écrits montrant un harcèlement : notes de services, messages, lettres recommandées avec AR (les harceleurs se doublent souvent de procéduriers !) ;
- les témoignages sont également très intéressants (notamment comme éléments de preuve).