Malgré les efforts que nos politiques déploient actuellement pour nous amadouer, la réponse qui sera apportée à la question que je me posais il y a peu ne fait aucun doute : les pauvres, une fois encore, devront payer. Malgré quelques annonces concernant de nouveaux impôts pour les riches ou la participation “volontaire” des banques aux frais de “gestion de crise”, il apparaît que ce qui nous attend maintenant fera passer le recul de l'âge légale de départ à la retraite pour une broutille : c'est désormais tout le système social français qui se prépare à être démantelé, et avec lui la solidarité envers les plus faibles, les acquis du Conseil National de la Résistance, enfin le contrat social dans son ensemble… En France, mais aussi partout en Europe.
Ce qui est étrange dans tout ça, c'est d'une part le silence des
peuples, qui espèrent inconsciemment la remontée de la bourse et la
perpétuation de ce système, et d'une autre la précision du timing, qui
pousserait presque les mauvais esprits à croire que les mesures
proposées ces derniers jours étaient déjà dans les cartons, n'attendant
plus que les vacances pour apparaître au grand jour, dans le silence
résigné des citoyens qui “ne comprennent rien à ces choses là”.
C'est qu'en quelques jours les choses se sont précipitées, et on nous a très vite sorti quelques mesures dont le fichier national des “profiteurs 'du bas'”,
pour traquer les 2 et quelques pourcents de fraudeurs (il faudra payer
combien pour mettre ce fichier en place ?), qui plus est accolé à un
fichier de fraudes des entreprises (les petites hein, pas les grosses, légalement dans des paradis fiscaux) ; comme si les sacrifices qui seront réclamés au peuple devaient s'arrêter là…
Mais bien sûr tout cela n'est que poudre aux yeux : en réalité,
c'est toute la solidarité, celle qui faisait il n'y a pas si longtemps
encore la fierté de la France, qui s'apprête à disparaître dans le
gouffre de la crise. Si on se penche un peu sur la proposition
d'inscrire dans la Constitution la fameuse “règle d'or” économique empêchant les déficits futurs, on s'aperçoit qu'elle n'est rien de moins que l'arrêt de mort de l'Etat social,
remettant en cause toutes les subventions accordées aux plus démunis
(associations de bénévoles, réinsertion, prévention, aides sociales…) de
manière définitive. Et si on ajoute à cela les dispositions imposées par la BCE à l'Espagne et l'Italie, on comprendra aisément que le pouvoir politique (ceux qu'on a élu !) ne contrôle plus grand chose…
Si on s'appuie sur ces éléments pour tenter d'appréhender les
conséquences de la crise sur les populations, il apparait alors que les
réformes en projet les toucheront directement dans leur vie quotidienne,
et contribueront à l'énervement des liens sociaux, déjà fragilisés par
une situation difficile : le climat social, en France comme ailleurs,
risque alors de se tendre encore, et on ne saurait exclure totalement la
possibilité d'une montée de la colère de la part des plus démunis.
Les “émeutes” en Angleterre ne seraient-elles pas d'ailleurs le
symptôme d'une maladie pourtant bien connue, la misère ? La misère qui
engendre la colère et la violence, comme on l'a vu déjà en Tunisie, en
Egypte ou ailleurs, et qui parfois dégénère même en mouvement de révolte
contre un gouvernement trop injuste… et souvent trop prompt à la
répression.
C'est là qu'il s'agit de remettre les choses en perspective : car
si les réformes prochaines exigées par le pouvoir financier sont
effectivement mises en place par le pouvoir politique, alors il faudra
s'attendre à la multiplication des violences comme à celle des
“réactions” à ces violences, du fait même de la misère “logiquement”
engendrée par ces réformes. C'est même à cette éventualité que nos
gouvernants semblent aujourd'hui se préparer, comme on l'a vu ces
derniers jours en Angleterre, et comme le prouve l'incroyable hypocrisie
autour des réseaux sociaux dont « lemonde.fr » nous fait écho à travers
deux articles publiés à trois jours d'intervalle (voir “ici“ et “ici“ ) : échaudés par les « révolutions arabes », internet (le seul média fédérateur
susceptible de conduire à l'organisation unie d'un mouvement
contestataire de grande ampleur) est la principale cible à laquelle
s'attaqueront les gouvernants pour empêcher les révoltes de se
transformer en révolution.
Cet exemple est également à mettre en relation avec les pourparlers
actuels sur la « gouvernance européenne », car les tensions sociales
qui s'ajouteront aux tensions économiques rendront certainement cette
option inévitable : le « coup d'Etat »
pour la prise de pouvoir de l'ensemble de l'Union européenne par le
couple franco-allemand sera alors pleinement justifié, comme la fameuse
« lettre ouverte »
du président nous y préparait déjà il y a quelques semaines, réclamant
dans celle-ci une sorte « d'union sacrée » destinée à mettre en place
cette nouvelle gouvernance.
Peu à peu, on le voit bien, se dessinent les contours de cette
nouvelle gouvernance (dont la crise se trouve finalement être l'élément
“déclencheur”), qui fondée sur de telles bases ne laisse présager rien
de bon. Car une fois cette nouvelle gouvernance engagée, il deviendra
alors difficile de se séparer du joug qu'on nous aura imposé.
Si on imagine maintenant que ces mesures drastiques ne suffisent
pas , on pourrait même envisager (pour les plus pessimistes)
l'instauration d'une sorte « d'état d'urgence » destinée à « lutter
contre les violences » qui ne manqueraient pas de se produire alors, ce
qui nous conduirait à subir un régime qui n'aurait désormais plus rien à
envier à ceux qui étaient encore il n'y a pas si longtemps (avant de
devenir des tyrans sanguinaires) des amis fidèles…
Mais dans ce cas-là, qui les empêcheraient alors de réprimer leurs opposants ?
Caleb Irri
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